Il faut bien commencer quelque part. Ç'aurait pu être de la vallée qui mène à la Selle (bof), ou de la vallée de la Mariande (mieux). J'ai choisi la Muande, ou la Lavey, je ne sais pas comment l'appeler, là où le Vénéon fait un coude et part droit vers l'est jusqu'à la Bérarde.

Question de logistique : la voiture est au hameau des Étages ; "faux" départ, il est déjà tard et je me presse sur le sentier en rive gauche du Vénéon.

Perspectives alléchantes, anticipation des jours à venir. A droite, le vallon de la Dibona.

Le sentier monte et descend, à travers prés et éboulis, tantôt au bord du Vénéon, parfois bien au-dessus du torrent ; on prendra plus le temps d'en profiter dans quelques jours. Les épilobes sont précocement fanées. Sécheresse et canicule de l'été 2022.

Enfin ! D'autant que le soir approche : le pont des Rajas (XVIIème siècle), qui franchit le Vénéon en contrebas du hameau de Champhorent. C'est le vrai départ de mon trek.

Petite bavante pour déborder le verrou qui ferme la vallée de la Muande. 100, 150 mètres de déniv', pas plus, il est 18 heures passées. Je trouve une belle plateforme juste au-dessus d'un oratoire et de 3-4 chalets de montagne inoccupés.

Première nuit confortable. Vivement demain.

(Suite du trek)

(Journée précédente)

Première journée, première vallée à explorer, la longue vallée de la Muande. De mon lieu de bivouac au-dessus de l'oratoire, j'y accède en quelques minutes. Au fond, ce n'est pas encore l'Olan (le pic), mais l'aiguille de l'Olan.

Premier spot sur la Muande, un magnifique pont génois surplombe le torrent.

Spécialement photogénique avec en arrière-plan la très belle cascade de la Donzelière. Je cherche le bon cadrage, m'aventure dans le torrent, puis remonte un peu en rive gauche...

Encore un cadrage de la cascade de la Donzelière seule, cette-fois ci.

En rive droite, au pied d'une bergerie, j'aperçois deux chamois, trop loin pour une photo présentable. Puis c'est le refuge de la Lavey, où je me pose quelques minutes. Gardien sympathique, carte sympathique, je recommande !

Le refuge de la Lavey est surplombé à l'ouest par un magnifique cirque en auge au pied de l'aiguille Rousse.

Y faire un tour, demain, peut-être, fait partie des options. Mon parcours n'est pas gravé dans le marbre ; aucun point de bivouac n'est repéré ; tout se fera sur l'inspiration du moment, ma forme, la météo, les paysages... Au moins je sais où je veux aller aujourd'hui et pour l'instant il s'agit juste de remonter la Muande en rive droite orographique.

Les cascades du torrent des Sellettes.

Me voilà au fond de la vallée de la Muande. Le sentier vire à gauche et commence à monter sèchement, on entrevoit le glacier des Sellettes et, au-dessus, la brèche de l'Olan, passage possible (mais en mode alpiniste) vers Font-Turbat et le Valjouffrey. Et sur la gauche, eh bien c'est l'Olan lui-même, sommet à la mythique face nord-ouest.

Au Deuxième Clot, dixit l'IGN, apparaît une cabane de berger, posée sur un petit replat. On la dirait gerbée par un hélicoptère. Elle est apparemment habitée, il y a des signes de vie, habits qui sèchent au soleil, bidon posé au bord de la fontaine, mais elle est vide à l'heure où j'y passe. Le sentier se fait plus aléatoire, finis les alpages, c'est maintenant 100% caillasse et fleurs de roche.

La carte IGN (Géoportail, en fait) dessine encore un "glacier du Fond", descendant jusqu'au lac de la Muande. Il a manifestement disparu, ou plutôt s'est replié sous la face nord de la cime du Vallon.

L'Olan. 

Et après quelques louvoiements dans les éboulis j'arrive à mon objectif de la journée, le lac des Rouies, altitude 2722 m.

C'est typiquement un lac de retrait glaciaire. Le glacier de la Lavey s'est divisé en plusieurs langues, à l'est et au nord-est, et a laissé à découvert la zone de surcreusement dans laquelle le lac des Rouies a pu s'installer.

Je contourne un peu le lac des Rouies, pour un coup d'œil sur le canyon dans lequel cascade son exutoire. (En face, cime du Vallon et lac de la Muande, toujours.)

Mais pour redescendre il faut que je retourne sur mes pas ; je tente bien un petit raccourci dans un couloir de roche, c'est très scabreux et je suis bien content de retrouver le sentier.

J'ai inventé la randonnée en échelle de perroquet (l'expression, sinon le concept), variante de la randonnée en étoile. Autrement dit chaque barreau d'échelle doit être parcouru dans les deux sens... Donc, retour au Deuxième Clot, puis, plus bas, au Premier Clot où je décide de faire bivouac. Je m'aperçois qu'un gigantesque troupeau de moutons est en train de dévaler des pentes supérieures.

Je suis un moment inquiet qu'il vienne jusqu'à moi, mais je me rends vite compte que le berger et ses deux borders collies sont en train de les parquer pour la nuit, à grosso modo 250 mètres de mon site de bivouac potentiel.

Puis tous les trois remontent tranquillement le chemin et me dépassent, probablement pour rejoindre la cabane sous le lac des Rouies. Ils laissent derrière eux les moutons et trois patous. Forcément ceux-ci s'intéressent à moi. Ils m'aboient dessus, font même mine de courir vers moi et puis laissent tomber. Je suis trop loin et trop tranquille pour les inquiéter. Rassuré également, je monte la tente en face des cascades des Sellettes.

(Suite du trek)  (Début du trek)

(Jour précédent)

Deux alertes-patous dans la nuit. Autrement dit, ils ont aboyé deux fois, au moins. Un renard, un chamois, ou bien juste un cauchemar canin ? Ou carrément un loup. Ce n'est pas un fantasme : depuis cette année une meute s'est installée dans le haut Vénéon.

Tandis que je réchauffe un peu d'eau chaude pour mon petit déjeuner, je vois réapparaître le berger et ses deux borders collies. Les patous leur font la fête, d'autant que le berger distribue quelques bons morceaux de barbaque. Il n'y a pas des masses de marmottes à boulotter la nuit.

Après quoi les moutons sont libérés et tout le monde remonte lentement les pentes de l'est.

Quant à moi je redescends d'abord vers le refuge de la Lavey ; je ferai le point tranquillou sur une table au soleil.

Décidément, ce cirque sous la pointe Maximin et l'aiguille Rousse me fait de l’œil.

Je traverse le torrent de la Muande au niveau du refuge de la Lavey.

Assis à une table de pique-nique, j'observe clients et clientes du refuge. La moyenne d'âge des randonneurs est en forte baisse, et ça s'est aussi beaucoup féminisé, c'est sympa. Je pèse mes différentes options. Mon aspiration à la spontanéité et à l'improvisation se heurte à quelques considérations pragmatiques. Tout bêtement comment se retrouver, ce soir et surtout demain soir, dans un endroit propice au bivouac.

Au final, je décide de coucher cette nuit au bord du Vénéon. Ce qui me laisse le temps de monter au lac des Bèches. Je dépose donc un maximum d'affaires au refuge de la Lavey puis, bien allégé, prend le chemin du torrent du Druvet.

A mi-hauteur de ce fameux cirque sous la pointe Maximin, le sentier bifurque à droite sèchement.

C'est raide, c'est pas mon meilleur jour, mais voilà quand même le lac des Bèches.

A noter la belle prairie, au niveau du lac, où il aurait fait bon bivouaquer.

Petit tour du lac des Bèches avant de déjeuner.

Et maintenant il s'agit de tailler la route, retour au refuge de la Lavey, retour au torrent de la Muande.

Dégringolade du verrou en face de Champhorent et me revoilà à arpenter la rive gauche du Vénéon. Il est bien gonflé de toute la glace fondue du jour, les deux kayakistes balaises que j'aperçois dans les remous ne sont manifestement pas des amateurs !

Non mais sérieusement, c'est pas un sport de cinglés, ça !?

L'idée est de se rapprocher du hameau des Étages, mais je reste quand même attentif aux possibilités de bivouac au bord du Vénéon.

Mais rien trouvé de sympa, alors tant qu'à faire je continue jusqu'aux Étages. Je jette mon dévolu sur un petit coin à peu près plat derrière un rocher, dans le pâturage à trois cents mètres du pont sur le Vénéon.

Petites gouttes de pluie alors que je finis de monter la tente, mais ça va s’améliorer, dixit Météo-France.

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