-
Jour 4 : Kirkjufellsvatn - Landmannalaugar
Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici : une atmosphère obscure enveloppe la ville, aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels la multitude vile, sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci, va cueillir des remords dans la fête servile, ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici, loin d’eux.
Vois se pencher les défuntes Années, sur les balcons du ciel, en robes surannées, surgir du fond des eaux le Regret souriant, le Soleil moribond s’endormir sous une arche.
Et, comme un long linceul traînant à l’Orient, entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.
Les muscles sont raides. L'épaule droite notamment est douloureuse. Les doigts sont écorchés, les ongles saignent. Mais au niveau des pieds, tout va bien ! Un Voltarène pour soulager les muscles, et ça repart !
Cette nuit aussi a été bizarre. Il a plu jusque tard. A un moment j'ai cru entendre comme une radio. Probablement était-ce le murmure du ruisseau gonflé. Ou alors des trolls écoutant la finale de la Coupe d'Europe (quant à moi je ne sais même pas qui joue contre l'Espagne).
Ciel encore chargé ce matin, mais il ne pleut pas et je resterai sous le niveau du brouillard.
Pour commencer, une petite bavante me permet de passer un col et de rejoindre la vallée de la Halldórsgil.
En descendant celle-ci, je remarque quelques sources d'eau ferrugineuse. Elles ne sont pas très fraîches mais on ne peut quand même pas parler d'eau chaude.
Me voilà dans la plaine de la Tungnaá. Pour une petite heure, je vais longer la route, celle où je suis passé en bus entre Landmannalaugar et Eldgjá. Arrive une 4x4 et oh des êtres humains. Je n'en avais plus vu depuis 42 heures.
Vision de la Kirkjufell et beaux reflets sur le Kýlingavatn.
Arrivé au pont sur la Jökulgilskvisl, j'ai prévu de rejoindre directement le volcan Ljótipollur. Mais voilà que je fais face à une coulée de lave chaotique.
Un chemin perce la coulée jusqu'à l'eau. Ensuite j'arrive à me faufiler au bord de la rivière. Je suis intrigué par ces galets gris et vérolés, le long du rivage. J'en jette quelques-uns à l'eau.
Bien vu, ils flottent ! C'est de la pierre ponce.
Déjeuner : bœuf au riz sauce piquante (Travellunch) et cerneaux de noix.
Plus loin, il est possible de passer par le lit de la Tungnaá. J'essaye de couper pour gagner du temps. Un bras de rivière à traverser, sans courant. Facile, je me contente de remonter les jambes du pantalon. Aîe, j'ai sous-estimé la profondeur. En plus, la vase essaye de me piquer mes crocs. Eh rends-moi ça, j’en ai besoin, moi, j'ai encore plein de gués à passer, et des costauds !
De l'eau à l'entre-jambe. Pantalon trempé. Bah, il séchera sur la bête. J'ai sauvé les crocs.
Je rejoins l'objectif de la journée, alors que le temps se met peu à peu au beau : le cratère d'explosion de Ljótipollur. Grandiose avec ses parois rouge vif à rendre jaloux mon Beau Harry.
Je suis vanné. Après avoir fait le tour du cratère, je décide de simplifier en passant par le Frostastaðavatn (compter les a... Non je ne me suis pas trompé. Le lac du village gelé ?).
Un pluvier s'approche de moi en couinant.
Je regarde tout autour et aperçois son poussin qui s'enfuit éperdument – j’ai failli lui marcher dessus. Je m'en approche et voilà la mère qui vient jouer à l'oiseau blessé pour détourner mon attention. Saisissant – comme dans les livres !
Je les laisse tranquilles. Je remonte le long de la Namshraun (retenez : -hraun = coulée de lave).
Un petit vallon à droite semble prometteur, j'y imagine bien quelques petites sources bouillonnantes. Je le remonte un instant, mais pas de fumerolles.
Me voilà à Landmannalaugar, au pied de la Laugahraun (z'avez été attentifs ? Traduction... La coulée de lave du bain chaud ?) et du Bláhnúkur (le Mont-Bleu, plutôt gris, en fait - pour le bleu, tadam... voir demain !).
Montage de tente (à l'aide de cailloux, pas moyen de rentrer les sardines - je hais ce camping), passage à l'accueil discuter avec le warden (on en reparlera plus tard) ; récupération d'une partie du matériel laissé il y a 3 jours, consultation et envoi des mails avec mon BlackBerry - y compris les premières journées de ce journal de bord, illustrées par quelques photos prises au smartphone. Plus beaucoup de batterie, va falloir trouver une solution.
Dîner : pâtes bolognaises (MX3), compote pomme-abricot (idem).
Comme il n'y a plus grand monde à la laugar, j'enfile le maillot de bain. C'est très différent de Strútslaug : 2 ruisseaux quasi bouillants viennent se jeter dans un bras de rivière aménagé. En fonction des courants, on a parfois une bulle d'eau à 70 degrés (j'exagère ;-) qui arrive dans le dos, parfois un filet d'eau glacée. J'adore !
Une vraie douche ensuite, avec savon, shampooing, et rasage.
Ce soir, comme on est au camp de base, j'abandonne momentanément Irving pour Heinrich Böll (« Portrait de groupe avec dame »). J'ai bien aussi quelques grilles de sudoku (encore une private joke), mais où ai-je mis mon crayon !?
A demain. (Pas de photo du bivouac, trop moche).
(Jour précédent) (Jour suivant)
Tags : kirkjufellsvatn, kylingavatn, ljotipollur, tungnaa, frostastadavatn, frostastathavatn, blahnukur, landmannalaugar
-
Commentaires
Bonjour,
Votre blog est très agréable à lire, je dois en rester là aujourd'hui mais je m'y remets très vite!! Vos photos de Ljótipollur sont vraiment bien, je n'ai pas réussi à attraper ce rouge comme vous l'avez fait.
Nous avons effectivement parcouru les mêmes paysages démesurés mais à un rythme et avec des outils bien différents...
La scansion de votre récit par la présentations des menus lyophilisés me plaît aussi beaucoup. Et je ne parle même pas de Bamba le Rouge!
Bravo!
Rémy