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Jour 7 : tour de la Laufafell
Toute la nuit ça a été comme si quelqu'un secouait la tente. Pas rassurés nous étions, d'autant que les sardines n'étaient pas très solides ; nous avons veillé.
Bamba m'a raconté une histoire de son pays qui, d'ailleurs, parle d'un de ses parents lointains. Je vais essayer de retranscrire son récit. Quittons cette tente froide et humide, installons-nous sous le baobab. Place au griot.
Zangué le grand chasseurIl existe un endroit où deux villages se sont installés, de chaque côté du fleuve Sassila. Depuis longtemps, quand un jeune homme veut prendre femme, il traverse le fleuve pour se fiancer dans le village d’en face. Et le jour du mariage, l’épousée traverse à son tour pour aller s’installer dans la maison de son nouveau mari.
Mais depuis quelques mois, un grand malheur est tombé sur les villages. Une mariée a disparu pendant la traversée du fleuve. Et puis une autre, et encore une autre. Maintenant les jeunes filles ne veulent plus se marier.
Zangué, le grand chasseur, n’habite pas très loin du Sassila. Un jour, il entend parler du malheur des deux villages. Alors il décide de les aider :
- Continuez de vous fiancer, leur fait-il savoir. Et pour le prochain mariage, je serai là : je trouverai la solution.C’est ainsi que le jour du mariage de la jeune Mariam, Zangué est là. Il va d'abord, comme il se doit, saluer le chef du village puis va faire un tour au bord du fleuve. Il y rencontre un tisserand.
- Bonjour, lui dit le tisserand, je m’appelle Bamba. Si tu rencontres mon homonyme dans le fleuve, surtout ne le tue pas.
- Je ne sais pas, dit Zangué. Après tout, j'ai bien besoin d'une paire de bottes neuves.Il faut dire que Bamba signifie crocodile, dans la langue du pays. Voilà donc le mariage qui est célébré. Et voilà Mariam qui monte dans la pirogue pour rejoindre son mari de l’autre côté du fleuve. Zangué le grand chasseur est dans la pirogue avec elle. Il tient son fusil à la main. Tout à coup un grand crocodile surgit de l’eau et se précipite vers le bateau. Pan ! Zangué tire. Le crocodile est atteint en plein coeur et disparaît dans le fleuve. Mariam rejoint sans encombre l’autre rive du fleuve et retrouve son mari.
Le lendemain matin, Amadou le pécheur bozo appelle Zangué : il a retrouvé un homme mort dans ses filets. Tout le monde accoure. On sort le cadavre du fleuve. C’est Bamba le tisserand ! On voit qu’il a été blessé mortellement au coeur.
- Voilà l’explication, dit Zangué. Bamba était un sorcier. C’est lui qui dévorait vos fiancées. Vous ne craignez plus rien maintenant. Mariez vos filles, et qu’elles vous fassent beaucoup de petits enfants !Revenons en Islande, d'autant qu'ici aussi, il fait beau ! Le canyon n'étant pas praticable, je pars au sud le long d'un plateau. L'Hekla se dévoile derrière moi.
Beau point de vue si elle se mettait en éruption. C'est possible d'ailleurs. En 2000, les signaux sismiques révélateurs n'ont précédé les écoulements de lave que d'un quart d'heure. Comme elle est censée entrer en éruption tous les 10 ans... (autant dire qu'elle est en retard).
Bon ben je ne vais pas attendre un quart d'heure ! Je continue vers les crêtes au sud où un panorama grandiose m'attend : la plaine de la Markarfljót.
On aperçoit aussi une chute d'eau au loin au nord - on en reparlera.
Maintenant le plat de résistance : il s'agit de traverser la Markarfljót, passage à gué le plus redouté de mon périple (c’est la rivière qui serpente, sur les photos précédentes), au pied de la Laufafell.
Pendant la descente jusqu'à la berge, j'ai le temps de gamberger, de contempler l'écume blanche des rapides dans le torrent. Passera, passera pas ? C'est aussi large qu'à la Jokulgil, mais plus profond et presque aussi tumultueux que le torrent de Strutslaug... Ça va être la bagarre, il faut se concentrer... Chaussons de plongée, crocs. Je garde le pantalon qui aura le temps de sécher au soleil. Je remets le sac au dos, sans la sangle abdominale, pour pouvoir l'ôter rapidement si je suis emporté.
En avant ! Pas à pas, les bâtons vibrent sous la pression du courant. Heureusement on voit le fond et où placer les pieds. Il faut avancer de biais, regarder la rivière dans les yeux.
Garder son calme et toujours 3 points d'appui. Profiter d'un répit dans les zones plus tranquilles sous les gros rochers. L'eau monte jusqu'à mi-fesses derrière, jusqu'au nombril devant (ça sert d'être grand) puis baisse ; ça y est, la Markarfljót est traversée !
Existe-t-il vraiment quelqu'un d'assez fou pour s'arrêter au milieu de la traversée et sortir l'appareil photo ??
J'enlève les affaires mouillées, j'essore et en profite pour grignoter quelques noix de cajou. Le plus dur de mon trek est derrière moi.
Je contourne peu à peu la Laufafell par le sud. Tiens, un container métallique ? On entend un groupe électrogène qui toussote. Peut-être une station météo ? En tout cas il y a une antenne, ça me donne l'idée d'allumer le BlackBerry. Effectivement, un peu de réseau. J'en profite pour envoyer quelques mails et les derniers épisodes de mon journal. Plus d'un quart d'heure de "télédéchargement"". La batterie n'en a plus pour longtemps, va falloir me rationner sur les photos au smartphone.
Déjeuner : paëlla au poulet MX3.
J'arrive au chaos du Laufavatn. Étranges créatures pétrifiées par centaines, mais ça ne rend pas bien en photo. J'y étais passé en 2009 ; les photos d'alors sont meilleures.
Je suppose qu'il s'agit d'une coulée de lave comblée par des dépôts de cendres.
Je longe le Laufavatn puis, continuant le contournement de la Laufafell, me voici maintenant dans un désert de cendres brunes.
Mon programme initial prévoyait l'ascension de la Laufafell, mais bof, des nuages se sont installés sur les glaciers, ça ne me tente plus. Un peu de lassitude après la poussée d'adrénaline de ce matin.
Du coup j'ai du temps devant moi, je décide de rechercher la chute d'eau aperçue ce matin et d'y bivouaquer.
Re voilà donc la Markarfljót !
Pâtes aux bolets avec crème (Travellunch), compote pomme-banane (MX3) et thé vert.
Vous avez vu la tente, à gauche de la photo ? Ça c'est du bivouac ! A demain.
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