(Accès au jour précédent)

Au petit matin blême, sous le refuge, le lac de la Glère est mauve, améthyste, parme, pourpre, magenta, zinzolin, aubergine... Tellement de nuances de violet, comme si c'était une couleur ambigüe, difficile à cerner.

Le temps de prendre le petit déjeuner, c'est estompé. Au menu du jour, le Turon de Néouvielle en boucle. La gardienne du refuge de la Glère me prédit 7 à 9 heures de marche, j'ai bien l'intention de faire mieux.

Il y aura des tas de lacs, j'avoue avoir du mal à m'y retrouver dans les photos ; il faudra me pardonner d'éventuelles erreurs. D'abord le lac de Coume Escure.

Le sentier suit d'abord la crète au bord de la vallée de Bolou, qui donne sur Luc-Saint-Sauveur. 

Le lac de la Glère (avec le refuge) et le lac de Coume Escure. 

Je laisse à droite le sentier qui part vers le col du Rabiet et le refuge Packe. C'est l'accès à la vallée de Bugarret, particulièrement sauvage ; ce sera pour une autre fois, l'exploration des monts qui font la transition entre le Néouvielle et les massifs frontaliers.

Lac det Mail. C'est le premier d'un chapelet dont je vais faire le tour. Je le laisse à main gauche, quittant le chemin balisé. 

J'ai dans l'idée de grimper au Turon de Néouvielle par la Coume Estrète - par l'ouest - avant de redescendre par la "voie normale" de Maniportet. Simplement parce que j'ai déjà fait cette rando dans le sens inverse il y a quinze ans. J'anticipe sur mon récit mais aujourd'hui je préconise plutôt de faire la boucle dans le sens horaire, quand on ne connaît pas.

C'est maintenant que je me paume peut-être dans mes photos. Lac de la Manche, probablement.

Lac Estelat Inférieur ? Au fond, c'est le pic de la Coume de l'Ours, et je vais devoir me faufiler dans la vallée à sa gauche. 

Un pêcheur matinal sur le lac Estelat Inférieur. Le lac est un miroir...

Dernier lac de la montée, il n'y a pas à se tromper : le lac Estelat Supérieur.

Au bout du lac Estelat Supérieur, c'est la farouche Coume Estrète, qu'il faudra gravir. Son austérité ficherait presque les jetons.

Il me vient d'ailleurs la très mauvaise idée de l'éviter, du moins en partie, en remontant les prairies sur la droite. J'ai l'impression qu'il y aura ensuite moyen de rejoindre la Coume Estrète à mi-pente par une série de paliers. C'est parti. Je surplombe le lac Estelat Supérieur.

Les pentes herbeuses me permettent effectivement de rejoindre une zone plus plane, un immense champ de blocs de toutes tailles. Au bout, c'est le col qu'il faut que je rejoigne, et au-dessus mon objectif ultime : le Turon de Néouvielle. 

Au lieu de poursuivre mon idée - qui était donc de rejoindre la Coume Estrète à flanc - deuxième erreur, je me suis laissé happer par une succession de cairns, qu'il est séduisant d'imaginer conduire jusqu'au col par un chemin facile. En vérité, c'est une purge, il faut soit sauter de bloc en bloc, faire l'équilibriste sur leurs arêtes, soit se faufiler au milieu. J'ai l'impression d'être très fort à ce jeu, en voilà une compétence utile dans la vie de tous les jours.

Déjeuner sur une roche plate, au milieu de nulle part... Les cairns ont disparu. Je continue.

Arrive le moment où mon manque d'humilité est évidemment puni. Je chute lourdement, ma cheville se coince dans un trou entre deux blocs. Je pense qu'il aurait suffi de vingt centimètres de chute supplémentaires pour que ça se traduise en fracture... Tant que j'avance ça va, ça ne gonfle pas trop. Peu à peu le chaos de blocs est derrière moi.

Les derniers hectomètres ne sont pas faciles, la pente s'est accentuée, mais enfin je rejoins le col de Coume Estrète et la vague sente qui remonte de la Coume. 

Depuis le col de Coume Estrète, les sommets frontaliers se dévoilent : le Casque, la brèche de Rolland, le Taillon. 

Une dernière pente pour rejoindre le sommet du Turon de Néouvielle, 3035 m.

Tandis que j'approche, j'aperçois, quasi en vision périphérique, deux grosses bêtes qui disparaissent derrière la crête à ma gauche. On aurait dit des bouquetins, mais je n'ai pas connaissance qu'il y en ait dans les Pyrénées. Quoiqu'il en soit je ne cours pas après. Trop fatigué.

(Suite de la journée)